Please enable JS

- Le duel d'Arnaldur par "MES"

- Le duel d'Arnaldur par "MES"

mars 22/Virginie/

Source image Pinterest

 

Romans et jeux de société, le thème de nos rencontres du mois de février a inspiré de nombreux lecteurs ... suivons cette piste jusqu'en Island où "Le Mauvais Esprit de Service" nous invite à pénétrer dans le monde inquiétant  d'Arnaldur Indridason

Arnaldur Indridason, né en 1961 en Islande, journaliste et critique de cinéma, vit à Reykjavik avec sa femme et ses trois enfants. En 1997, son premier livre, « Fils de poussière » (inédit en français) marque selon certains, comme Harlan Coben, romancier américain auteur de romans policiers, le départ d'une nouvelle vague islandaise de fiction criminelle.

Ecrit en 2011 (publié en français en 2014), « Le duel » paraît juste après « Etranges rivages » qui termine la « saga » Erlendur, mais il se situe, dans le temps de l’histoire, tout au début. Comme « Les nuits de Reykjavik », écrit en 2012 (publié en français en 2016), qui raconte ses premières armes dans la police, il trahit la difficulté que rencontre l’auteur à abandonner le personnage de son héros, enquêteur de la « Criminelle ». Dans « Le duel », le tout jeune agent Erlendur, alors affecté à la circulation, apparaît à la dernière page du livre et c’est son nom qui le termine.

« Le duel » se passe en Islande, en 1972. Il est centré sur un personnage assez énigmatique, Marion Brien, officier de la « Criminelle » au quartier général de la police, qui sera plus tard dans la saga d’Erlandur sa référence professionnelle et son égérie brutale et fragile. Le cadre est celui d’une enquête sur le meurtre d’un très jeune homme inoffensif et un peu simplet dans une salle de cinéma, pendant le film. Très vite, l’enquêtrice et son collègue de l’époque comprennent que la mort du gamin est liée à ce qu’il a pu enregistrer d’une conversation entre des inconnus sur le petit magnétophone à cassettes où il enregistre en catimini les bandes-son des films auxquels il assiste. Ils ont la certitude que l’enjeu dépasse le cadre individuel de la victime.

Car l’enquête criminelle se déroule dans une ambiance très particulière : Reykjavik est pendant l’été le siège du championnat mondial d’échecs, qui oppose, dans une rencontre devenue célèbre, le tenant du titre le russe Boris Spassky et l’étoile montante américaine de 29 ans, Robert ou « Bobby » Fischer. Rappelons qu’à cette époque l’URSS domine sans partage les échecs de haut niveau : Spassky est le dernier d’une suite ininterrompue de champions du monde soviétiques depuis 1948 et il n’a joué que 5 parties contre Fischer, qu’il a d’ailleurs remportées. C’est dire qu’en plus du match intellectuel que représente cette rencontre pour les joueurs, accentué par la différence d’âge et le souci de leur consécration personnelle, c’est tout le prestige d’Etats antagonistes qui est en jeu. On peut sans exagérer dire que « pendant deux mois l’épicentre de la guerre froide n’est plus à Cuba ni au Vietnam ni même à Berlin. Il est en Islande, sur un échiquier de 64 cases posé sur une table de bois dans le palais des sports de sa capitale ». Il semble aux yeux de tous que « chacun de ces deux hommes, en déplaçant (sa pièce) sur la table de jeu, fait faire à son pays un pas imaginaire sur la carte du monde ». D’où un climat parfaitement délétère et angoissant où les exigences de Fischer, qualifiées de « caprices », qui ont émaillé ces vingt et une parties célèbres, sont comprises par les soviétiques comme éminemment politiques, c’est à dire destinées à déstabiliser le champion russe, à gêner sa concentration, et, à travers lui, à déconsidérer l’entier système de l’Est.

Sur fond d’espionnage, de personnels d’ambassade douteux, de complots ténébreux, d’enregistrements illicites et d’écoutes téléphoniques non autorisées, le roman tente de mener de front quatre thèmes : l’enquête policière classique, avec des côtés typiquement islandais, la vie et les souvenirs douloureux de Marion, le déroulement du championnat, menacé par les multiples incidents du fait de Fischer, et la fuite clandestine des dissidents soviétiques vers l’Ouest, difficile et toujours dangereuse...

Il n’est pas certain qu’il y parvienne. La juxtaposition de ces éléments disparates ne fait naître ni harmonie ni dysharmonie susceptible de porter sens. « Le duel » est loin d’être le meilleur livre d’Arnaldur Indridason. Il permet cependant d’entrer dans « son » monde, de s’initier à sa fascination pour ses personnages dont il s’attache à décortiquer les motivations les plus intimes, à son goût des situations obscures et désespérées, à sa lenteur à cheminer dans les dédales des faits et des êtres, à son art de nous faire entrer dans les coulisses de ce qui se joue sur scène.

Et tout cela bien sûr dans la saveur très islandaise du « skyr » (fromage frais assez mou), de la « mort noire » (l’eau de vie : Brennivin), des œufs de lompe, de l’églefin accommodé de purée de pommes de terre sucrée.

Stop ! on n’est plus en janvier…

PS. On peut retrouver toute l’ambiance détestable et malsaine du championnat du monde 1972 dans le film du réalisateur Edward Zwick « Le prodige », sorti en septembre 2016, qui est un « biopic » de Bobby Fischer.

Pour ceux que les échecs passionnent, on recommande un film assez génial, peu connu, « La diagonale du fou » de Richard Dembo, avec Michel Piccoli, sorti en salles en 1984 et en DVD en janvier 2015.

Les passages entre guillemets ne sont pas extraits du livre mais de certains commentaires en ligne que le rédacteur s’est appropriés, les trouvant judicieux.

Pour ceux qui souhaitent lire la saga dans l'ordre, la chronologie est en ligne !

 

 



RELATED POSTS


Commentaires/ 4

  • Portrait de L'argonaute
    L'argonaute (non vérifié)
    mar 22, 2017, 15:03-répondre

    Ce qui est bien avec toi, MES, c’est que même quand tu démolis un livre au bazooka, on a quand même envie de le lire. Ca me dit d’aller explorer les brumes islandaises. Donc si j’ai bien compris le jeu de piste, je file à « Sous la lampe », je récupère la chrono… Youpee ! je commence par … la Cité des Jarres, c’est bien ça ? Tu me promets que je vais aller jusqu’au numéro 9 ?

  • Portrait de Zokzok
    Zokzok (non vérifié)
    mar 22, 2017, 15:03-répondre

    Bonjour. Je ne comprends pas le jeu de piste. Vous jouez à quoi ?

  • Portrait de Virginie
    Virginie
    mar 22, 2017, 15:03-répondre

    Bonjour Zokzok .... en fait c'est pour ouvrir des pages supplémentaires ! Ceux qui veulent en savoir plus peuvent aller sur d'autres pages. On a la chronologie en ligne. Comme ça ça "allège" les articles. D'ailleurs sur cet article il va aussi y avoir un renvoi sur un extrait. Ce sera dans "Citations" mais ce n'est pas encore en ligne... patience !

  • Portrait de MES
    MES (non vérifié)
    mar 22, 2017, 15:03-répondre

    Parfois tu es attendrissant, L’Argonaute ! qu’est ce que tu veux que je te promette ? Tout dépend de toi ! si t’es pris ou si t’es pas pris….Moi je me suis fait emballer quelque chose de bien mais j’aime les brumes et les endroits qui sortent de l’ordinaire. Pour répondre à ZokZok (charmant, ça, ZokZok, encore une énigme !) à qui on souhaite la bienvenue, je crois qu’il vaut mieux que j’envoie un petit texte à Virginie, quand elle aura maté son système informatique qui joue les Broncos apaches. Effectivement, quand on n’a pas assisté à la réunion où on en a parlé, c’est difficile de prendre le train en marche (le petit train du Far-West, bien sûr). Prends patience, ZokZok !


LEAVE A COMMENT