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« LA FENETRE JAUNE » de SERGE BRUSSOLO par F.L.

« LA FENETRE JAUNE » de SERGE BRUSSOLO par F.L.

mai 24/Virginie/

                                                                                     Source image : Pinterest

 

Serge Brussolo, auteur français de romans de fantastique et de science-fiction, romans historiques et policiers, de terreur (thriller) ou d’espionnage, écrit en outre sous quatre pseudonymes*.

 

Né en 1951 (65 ans) dans une famille modeste, attiré depuis l’enfance par l’écriture, Serge Brussolo ne perce qu’en 1979, lorsqu’une de ses premières nouvelles « Funnyway », publiée l’année précédente dans l’Anthologie « Futurs au présent » dirigée par Philippe Curval, obtient le Grand prix de la science-fiction française. Depuis 2000, il fait partie de la direction littéraire des éditions Le Masque. Il ne se classe pas lui-même dans la science-fiction mais plutôt dans le fantastique, l’étrange, le merveilleux. Doté d’une prolificité étonnante et d’un imaginaire échevelé, il touche à tous les genres romanesques y compris le classique (La moisson d’hiver, 1995), le roman d’aventure sociologique (Le nuisible, 1982 ; Le sourire noir, sur l’enfer de la rue, 1994 ) ou historique (La princesse noire, 2004).

 

Il a publié également plusieurs séries de contes pour la jeunesse, qui rencontrent un très bon accueil du public (en particulier avec son héroïne Peggy Sue, presque aussi traduite que Harry Potter). Il a obtenu plusieurs prix littéraires dont le Prix Rosny aîné pour Subway en 1981 et le Grand prix de l’imaginaire à trois reprises dont une pour le roman Opération serrures carnivores en 1988.

 

Ses intrigues sont basées sur des situations ou des hypothèses d’une grande originalité et ses titres sont déjà de véritables trouvailles : par exemple Le rire du lance-flamme (1985), Le syndrome du scaphandrier (1992), La mélancolie des sirènes par trente mètres de fond (2004).

 

Il excelle à créer des atmosphères inquiétantes et morbides et des personnages englués dans des problèmes qui les dépassent. En quelques traits, il brosse cadres et paysages avec une économie de moyens remarquable chez un auteur aussi imaginatif, que l’on verrait plutôt se laissant entraîner dans des descriptions minutieuses de ses fantasmes.

 

Cette économie se retrouve dans les personnages qui sont presque des croquis. Pas de grands discours sentimentaux ni d’inquiétudes métaphysiques chez les « héros ordinaires » de Brussolo qui se contente, pour notre plus grand plaisir, de les mener « à la cravache» pour qu’ils s’extraient des cauchemars qu’il a dressés pour eux. Son œuvre a permis cependant à certains de se poser des questions, en particulier sur ses liens avec la tradition hermétiste et l’ésotérisme chrétien (?) et Jean-¨Pierre Planque a pu le qualifier de « symboliste dont les écrits transposent la recherche, la quête de la profondeur et l’expérience mystique » (Brussolo l’alchimiste, SFère, juin 1984). « Hantise de l’engloutissement, élaboration d’une biologie fantasmatique, flirt bachelardien avec les quatre éléments, influence du polar sur la structure en forme de quête du récit, angoisse gnostique devant le fait absurde d’exister dans ce monde et dans ce corps, telles sont les clefs de l’œuvre brussolienne (…) » (Denis Guiot in Le monde de la science-fiction, 1987).

Nous nous contenterons d’admirer chez lui des dons de prodigieux amuseur. Il nous y encourage d’ailleurs en déclarant superbement : « Aujourd’hui seule m’importe une force brute qui coule et ravage en se moquant des constructions savantes et des minauderies stylistiques. Je tire à la chevrotine sur des fantômes qui se font de plus en plus précis, je (ne) fais plus de détail !(…) ».

Bien sûr, on trouve chez lui maisons hantées, vaisseaux fantômes, animaux maléfiques, huis clos étouffants, mutations et permutations horrifiantes, êtres flous à la limite de la dégénérescence physique, morale ou psychique. Mais ces poncifs sont emportés, comme feuilles au vent, par un style d’une originalité radicale, dans un rythme ensorcelé qui captive le lecteur et le laisse pantelant.

Ses premiers livres, introuvables, sont en cours de réédition totale chez Vauvenargues (collection Intégrale Brussolo).

 

 

Le roman « La fenêtre jaune » paraît en 2007 au Livre de Poche. Il raconte l’aventure effroyable d’une très jeune femme, Cassidy dite Cassie, lancée de façon héroïque mais très irréfléchie dans la recherche d’un frère et d’un fiancé disparus, alors qu’elle déteste le premier et a rompu avec le second.

 

On est tout de suite pris par la description du désert californien, ses cactus, ses crotales, son haleine brûlante et chargée de miasmes radioactifs. On tremble avec Cassie dans la casemate encrassée où ont vécu « ses » hommes, où des portes blindées protègent de mystérieux placards. On avance pas à pas avec elle vers l’inimaginable.

 

Certains critiques ont voulu voir deux parties dans le récit mais, à notre sens, l’auteur n’aurait jamais pu nous faire basculer dans pareille invraisemblance s’il ne nous avait pas progressivement « curarisé » la cervelle avec ses légendes indiennes et ses odeurs de moteurs et de pneus surchauffés. Il fallait ces prémices de l’impossible, cette voiture au sommet d’un piton vertical, cette statue humaine inoubliable qui change en or ce qu’elle touche et s’enfonce lentement dans les entrailles de la Terre, pour que nous puissions, avec Cassie et son vieil amant, nous jeter à travers la fenêtre jaune.

 

Impossible de dévoiler ce qui se trame de l’autre côté !

 

folie de scientifique, folie d’un monde clos qui devient prison, fantômes à l’affût des vivants, pénurie et disparitions, paradis devenu enfer d’une impossible et criminelle immortalité. C’est si criant de vérité et si haletant que quelques illogismes et maladresses passent -presque- inaperçus. 

On ne vous dira pas si l’héroïne et son GI sur le retour s’en sortent, rassurez-vous. Mais, quand vous l’aurez lu, on pourra discuter de la façon dont l’histoire s’achève. Il doit être bien difficile à certains auteurs de freiner leur verve littéraire et d’arrêter d’écrire, à la fin de la page, pour que si peu sachent donner le coup de hache nécessaire à une certaine perfection technique.

C’est vrai qu’arrêter Brussolo d’écrire est l’équivalent d’arrêter les chutes du Zambèze…

 

 

 

*Pseudonymes : Akira Susuko, Kitty Doom, D. Morlock et Zeb Chillicothe (collectif)

 



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Commentaires/ 2

  • Portrait de Beasihono
    Beasihono (non vérifié)
    mai 24, 2017, 14:58-répondre

    Des informations sur l'auteur et sur son roman comme de la mitraille qu'on ne peut éviter..et si le seul moyen d'avoir la solution était d'ouvrir et se plonger dans ce roman? Une invitation qu'il est difficile de décliner. .. .

  • Portrait de Virginie
    Virginie
    mai 24, 2017, 14:58-répondre

    Béasihono, comme toi, j'ai été happée par cet article et j'attends avec impatience de voir si l'ouvrage est disponible à la médiathèque !!


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