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- La Voie de l’Ennemi - par MES

- La Voie de l’Ennemi - par MES

septembre 11/Virginie/

Source image : Pinterest

 

                          Vous souvenez-vous de la chanson de Trenet « Quand une marquise

                                   rencontre une autre marquise qu’est ce qu’elles se disent ?

                                                        des histoires de marquise ! ».

                       Alors mon propos ne vous surprendra pas :  « Quand un navajo rencontre

                                            un navajo, qu’est ce qui leur tient chaud ?

                                                        des histoires de navajo ! »

 

 

C’est certainement l’ambition de Tony Hillerman pour ce premier roman, bientôt suivi de beaucoup d’autres dans la même veine d’exaltation de la « Renaissance amérindienne ». « La Voie de l’Ennemi » est paru en 1970 aux USA et il n’a pas fallu moins de vingt ans pour que sorte la version française chez Rivages/Noir. Comme souvent, les titres, parus et traduits dans le désordre, prennent davantage de consistance quand on les lit dans l’ordre chronologique des évènements qu’ils racontent.

La trilogie Joe Leaphorn se compose de « La Voie de l’ennemi », suivi de « Là où dansent les morts » puis de « Femme qui écoute ». Pour ceux qui voudraient approfondir en s’amusant leur connaissance des moeurs des tribus indiennes de la région des Four Corners, à la frontière du Nouveau Mexique et de l’Arizona, il y a une autre trilogie, celle de Jim Chee (Le Peuple des ténèbres, Le vent sombre, La Voie du fantôme), puis la série des enquêtes de Leaphorn et Chee et d’autres publications n’ayant pas pour cadre la police tribale navajo.

 

La « Voie de l’Ennemi » est le nom d’une de leurs cérémonies sacrées, composées de chants, de danses, de confection de peintures de sable et d’incantations diverses, qui peuvent durer plusieurs jours. Elles sont destinées à renvoyer sur son auteur les maléfices et mauvaises actions qu’un sorcier hostile a projetés ou commis sur un membre de la famille ou du clan. Cette malfaisance a rompu la Loi de l’Equilibre et de l’Harmonie universelle, la « Voie du Milieu », qui unit l’être humain aux éléments et aux autres créatures du monde, exclut l’excès et proscrit toute violence comme tout enrichissement. D’où la nécessité de cette cérémonie particulière qui rétablit les équilibres compromis. Mais, visant précisément un étranger à la tribu, elle prouve que tous savent, au moins, d’où vient le coupable. Le grand rassemblement qu’elle occasionne va permettre à l’enquêteur Joe Leaphorn de mener sa recherche précautionneuse du meurtrier.

                                     Parce que je ne vous ai pas encore dit qu’il s’agit d’enquêtes policières ?

                                          Mais alors, des comme ça, vous n’en avez encore jamais lu !!!

D’abord, vous avez le cadre : montagnes sauvages, mesas et gorges aux couleurs fauves, déserts hirsutes, orages monstrueux et torrents à sec. Après, vous avez des hommes qui portent de longues nattes et ont troqué leurs vêtements de peau pour le jean yankee et leurs poneys au pied sûr pour des « pick-up trucks » rugissants et puants. Ensuite, vous avez l’affrontement des grands mythes d’hier et des contraintes de « la Loi et l’Ordre » d’aujourd’hui, la rencontre des talents de ceux qui vivent encore, sagement mais petitement, de leurs moutons et des convoitises du monde industriel sur leurs espaces pelés. Enfin, vous avez le charme des conversations lentes, des attitudes imperturbables et des silences très ritualisés. A nos yeux, ils ne font que mettre des obstacles supplémentaires à l’efficacité et à la rapidité du travail de police, mais ils trouvent chez les « policiers bleus » une patience et une compréhension infinies.

                                                     Car, bien sûr, navajos ils le sont tous !!!

Policiers comme criminels ont le même savoir ancestral du lacis des arroyos, des canyons et des grottes qui percent les falaises, des points d’eau invisibles, de la piste qu’on efface avec une branchette de pin, de l’interprétation du vol des chouettes et des hululements des coyotes la nuit. Tous connaissent les valeurs et les croyances du « Peuple ». Ils les respectent, les redoutent… ou s’en servent.

 

J’avoue que j’ai été au début déconcentré par tout ce folklore et que je me suis demandé si le côté ethnologique n’allait pas définitivement engluer l’intrigue. Mais quand ça démarre enfin, c’est au grand galop. Pas plus que les rênes, on ne peut lâcher le livre avant la fin.

                                                   Alors, si vous ne l’avez pas encore découvert,

 

venez vous perdre avec moi et avec l’ami Gauthier qui m’en a ouvert les portes, dans ce monde si déconcertant où magie ancienne et passions modernes se joignent sans se mêler. Venez découvrir ce qui survit encore de cette Voie du Milieu et de sa poésie si menacée…

 

                                              Je marche d’habitude là où la pluie tombe.

                                                     Entouré du maïs blanc je marche.

                                              Entouré des nourritures douces je marche.

                                                 Entouré des eaux recueillies je marche.

                                                       Entouré du pollen je marche.

                                             Je marche d’habitude là où la pluie tombe.

                                                                   (chant navajo)



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Commentaires/ 1

  • Portrait de MES
    MES (non vérifié)
    sep 11, 2017, 16:18-répondre

    Je viens de finir le second volume « Là où dansent les morts ». Je le trouve encore meilleur que « la Voie ». Je sens que je vais me jeter sur le troisième : « Femme qui écoute ». C’est vraiment le genre de lecture dépaysant au possible.


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