Source image Pinterest
Cet article est très long, je m’en excuse mais ce sont vos interventions qui sont très riches. Prenez-le plutôt comme un compte-rendu détaillé de nos rencontres où vous pourrez venir rechercher des idées de lectures lorsque vous serez en panne d’inspiration !
Au mois de Novembre nous sommes invités à raconter comment un livre a changé notre vie !
Deux réunions ont eu lieu au mois de novembre à Saint-Auban puis à Valderoure, afin d’inviter les lecteurs à venir partager les expériences liées à leurs rencontres littéraires. Rien de moins ce mois-ci que « Le livre qui a changé ma vie » !
Ce qui est amusant c’est que quatre ouvrages ont été choisis dans les deux groupes sans que les personnes se soient concertées.
Il s’agit de la Nuit des temps de Barjavel. Les amoureux qui traversent le temps ont transporté deux de nos participants. A travers cette œuvre de science fiction, qui met en scène une nouvelle version du mythe de Roméo et Juliette, le lecteur se pose la question de l’immortalité et de l’amour éternel. Si Tristan et Yseut devenaient éternels, leur amour le serait-il aussi ?
Toujours du même auteur, Ravage a également été présenté. C’est un roman d’anticipation écrit en 1943. Soudain l’énergie disparait. Plus rien ne fonctionne. Le monde moderne est derrière nous. Un retour à l’état sauvage est-il envisageable ? On repart à zéro, tout le système de la civilisation s’effondre. Que reste-t-il de l’humain ? Gauthier et Marie ont aimé ce roman qui sonne comme une mise en garde : ne répétons pas indéfiniment les mêmes erreurs !
Bernard nous a parlé du film de Luc Besson, Le dernier combat, sur le même sujet.
Ensuite, Le Parfum de Patrick Suskind a été choisi par deux lectrices de Caille et Saint-Auban. Nicole a aimé lire les descriptions de senteurs étranges comme la pierre ou le sable. Ce fut aussi l’occasion de découvrir que la création du parfum est une construction étonnante : si on mélange différents éléments à l’odeur désagréable, on arrive à créer un parfum merveilleux. Quant à Patricia, elle a raconté comment cette lecture lui a permis de développer son sens de l’odorat. La description de certains parfums inattendus a éveillé en elle de nouveaux territoires olfactifs.
Pour finir, La mort est mon métier de Robert Merle raconte comment un officier SS responsable d’un camp de la mort se révèle être par ailleurs un homme tout à fait « normal », un père de famille ainsi qu’un époux aimant et respectueux. Cette plongée dans le quotidien et dans la psyché d’un monstre ordinaire a bouleversé deux habitués de nos rencontres. Ils nous ont raconté comment cette lecture, en les mettant très mal à l’aise, les a obligés à se poser des questions sur la nature humaine et la facilité avec laquelle l’idéologie nazie a pu manipuler les esprits.
Bernard nous a parlé de Sylvie de Nerval et du Grand Meaulnes d’Alain-Fournier qui lui avaient ouvert la porte de la littérature, notamment grâce à la place que jouent l’enfance et l’imagination au cœur de ces deux romans. Nerval évoque « l’épanchement du songe dans la vie réelle ». Soudain, le quotidien est teinté de rêve et de magie.
Françoise a choisi de nous parler de La nuit du Jabberwock de Fréderic Brown. Ce roman de science fiction est aussi un roman policier farfelu qui mêle aux héros les personnages d’Alice au pays des Merveilles. L’intrigue se passe dans une petite ville des Etats Unis dans les années 50. Françoise a raconté comment cette lecture lui a ouvert les yeux sur la réalité de l’autre. Certaines personnes sont riches d'une réalité intérieure qui diffère totalement de ce qu’ils donnent à voir aux autres.
Jeannine nous a parlé de Colette avec la série des Claudine ainsi que des ouvrages de Max Gallo. Ce qu’elle apprécie dans ces lectures, c’est de se plonger dans une époque qu’elle n’a pas connue. C’est aussi pour cette raison que Geneviève aime les romans de Christian Jacq qui lui ont permis de découvrir la période de l’Egypte des pharaons. A travers ces descriptions elle a l’impression de « voir » réellement la vie des personnes qui ont vécu en ces temps reculés. Elle aime aussi particulièrement les écrits engagés de Simone de Beauvoir qui évoque le Paris des années soixante. Pour les mêmes raisons Geneviève a aimé les descriptions très réalistes des ouvrages d’Emile Zola. Gauthier nous a lors raconté comment la série de Robert Merle, Fortune de France lui a permis de comprendre l’histoire de France de l’intérieur car on y décrit la vie d’une famille entre les règnes de François 1er et Louis XIV. C’est à partir de ces lectures qu’il s’est mis à aimer l’Histoire !
L’oeil d’Eunice de Calouan nous a été présenté par Patricia (cet ouvrage est disponible à la bibliothèque de Caille). Une famille quitte Paris pour s’installer en Province. Les enfants découvrent leur collège ainsi qu’un univers totalement nouveau. L’histoire devient plus grave lorsque le père d’un élève tombe malade, empoisonné par les pesticides répandus dans les vignes. Malgré un sujet grave, le roman reste malgré tout plein d’espoir. C’est ce qui a plu à Patricia et a renforcé sa conscience écologique.
Béatrice a présenté la Porte étroite d’André Gide. L’ouvrage rapporte l’histoire d’un amour hors du commun. L’héroïne, en quête d’amour absolu, se dirige vers le mysticisme et le martyr. L’amour, la douleur et la mort traversent le roman de part en part. Béatrice a été amenée à se poser des questions sur le sens de cet amour total. Est-ce vraiment de l’amour ? L’amour ne peut-il pas, au contraire être serein ? Patrick a fait un rapprochement avec La lettre d’une inconnue de Stefan Zweig. Une jeune femme sacrifie sa vie à la passion qu’elle voue à un homme qui ne l’a jamais remarquée. Patrick nous explique que c’est l’œuvre entière de Zweig qui l’a fasciné, comment on s’aperçoit que toutes les actions sont dictées par l’inconscient, comment tous nos choix trouvent leur origine dans le sentiment et l’émotion. Les descriptions de l’univers intérieur des personnages sont époustouflantes. Chaque roman commencé est impossible à lâcher, jusqu’à la dernière ligne.
Cate a présenté Le Théâtre et son double d’Antonin Arthaud. Cet ouvrage lui a apporté des notions sur la façon d’appréhender l’espace à travers le corps…. et puis un jour, elle est devenue plasticienne !
Les contes de fées ont joué une part importante dans la construction de l’imaginaire de nombreuses personnes présentes.
Marie a précisé qu’offrir un livre n’est jamais anodin et peut bouleverser une vie. En lisant l’Etranger de Camus elle explique qu’elle s’est mise dans la peau du narrateur. Elle a complètement fusionné avec le discours intérieur du personnage principal et a ressenti un véritable choc lorsque ce dernier a commis un meurtre sans raison.
Pour ma part j’ai raconté comment la lecture de Malicroix d’Henri Bosco m’avait révélé (confirmé ?) le bonheur de la solitude dans la nature. Le personnage principal reçoit en héritage d’un oncle éloigné, une île située en Camargue sur le delta du Rhône. Il ne pourra vraiment entrer en possession de cet héritage que s’il parvient à passer trois mois seul dans l’unique masure de l’île. Commence alors un dialogue intense entre les éléments, les fantômes de l’île et les mystérieux habitants du lieu. Cette lecture a enraciné en moi le désir de quitter la ville pour m’installer en pleine nature !