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Soldat de seconde classe ZED
à
Mme La Générale des Anges, Vestale en chef
Rapport de service
Date de l’événement : 25/07/2017
Heure : 15h
Lieu : St Auban
Confidentialité : niveau 4*
Madame la Générale
Conformément à l’ordre de mission qui nous avait été remis, notre déplacement sur St Auban s’est fait par la route. En raison de la présence malencontreuse sur cette dernière de l’unique autobus de la journée, plus lent que notre véhicule de fonction et qui nous précédait, nous n’avons pu rejoindre le lieu de rendez-vous qu’avec six minutes et quinze secondes de retard (6’15’’). La réunion avait commencé à l’heure dite mais nous avons été acceptés, malgré le dérangement considérable occasionné par notre arrivée. Nous n’avons donc pu à ce moment relever les identités des présents mais ils sont tous bien connus de nos services et nous avons pu enregistrer discrètement leur présence (voir annexe 1).
L’assistance était encore plus nombreuse que lors de la réunion précédente et s’est répartie dans l’étroit lieu d’accueil d’abord selon la forme d’un cercle, puis à la suite d’autres arrivées tardives, d’un caquelon puis d’une poêle à frire. A noter que le nombre de chaises était insuffisant (voir annexe 2 : rapport à M. l’Intendant des armées célestes) ainsi que le nombre de calissons, en raison de la gourmandise de P. qui les avalait à poignées (voir annexe 3 : rapport à la P.M., niveau de confidentialité 3). Il y avait cependant le nombre nécessaire de gobelets pour le jus d’orange. En raison de la belle saison, la porte du local a pu être laissée ouverte. De ce fait, l’oxygénation est restée correcte et nous n’avons pas noté de malaises dans le public ni dans nos effectifs.
Malgré l’efficacité de la secrétaire de séance occasionnelle, qui a scrupuleusement distribué le temps de parole et inscrit au procès-verbal les très nombreuses interventions des participants, nous avons noté plusieurs dérapages plus ou moins contrôlés dans l’attitude et les commentaires de certains d’entre eux.
Outre les prélèvements excessifs, déjà cités, effectués sur les vivres du jour, nous avons retenu une agression caractérisée de X sur Y (voir annexe 4, niveau de confidentialité 3), à propos de l’achat inattendu d’une première édition par X, aux dépens, semble-t-il, de Y qui n’aurait pu la préempter, vu l’alacrité dont X aurait fait preuve dans cet achat. Cette alacrité tout à fait malhonnête a été confirmée par le comportement guilleret du coupable présumé et ses invectives peu flatteuses vis à vis de Y, outrageusement comparé à un vampire, dont nous avons été témoins. Nous n’avons pu retenir à titre d’indice le livre en question, son possesseur paraissant prêt aux pires exactions s’il lui était fait violence. La victime présumée n’a pas porté plainte. On ignore par ailleurs quelles suites l’éditeur a réservées à cette bévue de son service d’expédition.
Le second dérapage a été constitué par la façon dont, tout à fait irrégulièrement eu égard au temps de parole, une discussion très animée a commencé à l’occasion de la présentation d’une oeuvre de Robert Merle et s’est poursuivie pendant vingt-quatre minutes (24’, nous disons bien 24’). Un intervenant ayant fait mention du livre « La mort est mon métier » du même auteur, un échange soutenu a eu lieu sur un certain « droit de ne pas obéir à un ordre injuste ». Il a été cité à ce propos le nom d’un personnage tendancieux, nommé, à ce qu’il nous a semblé, Thomas Dakin. Cet individu, inconnu de nos services, apparemment dangereux, devrait faire l’objet d’une enquête discrète mais urgente.
Les présents ont ensuite gravement dérapé sur la question, hautement sensible, des vaccinations et des profits des laboratoires pharmaceutiques mais ces excès ont été heureusement arrêtés par l’un des participants et l’ordre a pu être rétabli.
Nous renvoyons au procès-verbal de séance pour l’exposé des présentations par la totalité des participants, ce qui est rare.
Ainsi que nous l’avons déjà signalé dans des rapports précédents, au fur et à mesure des réunions, les interventions sont de plus en plus vigoureuses et passionnées, émanant même de personnes jusque là très discrètes et peu loquaces. Une tendance certaine à la critique très argumentée se fait jour durant ces travaux. Cette personnalisation des réactions ainsi que l’extrême bonne humeur qui préside à ces réunions nous paraissent également constituer un grave manquement à la procédure.
Devant la difficulté sans cesse accrue d’apprécier la qualité et la pertinence des remarques faites à ces occasions et d’assurer la discipline de ce genre de rencontres, le signataire considère qu’il est autorisé à suggérer à la fois une augmentation de nos effectifs et la spécialisation de certains agents qualifiés.
Signé :
ZED
Caille, le 26/07/2017
(tampon du poste)
* niveau 4 : élite composée des membres du club de lecture et des visiteurs du blog
MES cet après-midi je pleurais de rire qur mon clavier en mettant ton texte en ligne !
Eh bien moi, ton ange délateur ne me fait pas rire. Il va me faire passer pour une je ne sais quoi ! moi, malmener« notre » précieux libraire, alors que je chante ses louanges urbi et orbi ! Car c’est bien grâce à sa serviabilité et son acharnement qu’on a pu solennellemnt remettre à la secrétaire de séance le bel exemplaire -toilé, ma chère !- du « Bal des maudits », introuvable et pourtant trouvé ! ton zélé crétin, on ne peut le dégrader puisqu’il est déjà au bas de l’échelle mais si tu ne lui tords pas le cou, moi je vais lui voler dans les plumes s’il prétend se pointer à nouveau !
ah oui, je confirme ! L'exemplaire introuvable se trouve à l'atelier de restauration du Livre voyageur et sera bientôt en service :-)